1 août 2011

Brevik "intellectuellement malade"...

PhiGéo  

Robert Mendick du Telegrah décrit à l'aide du manifeste laissé par Breivik et d'extraits d'interview de personnes l'ayant connu en Norvège la vie du tueurs "justicier" mi-délirant, mi-idéologue de l'île d'Utoya.
Son père et sa mère se sont quittés alors qu'il n'avait qu'un an. Son père a semble-t-il affirmé que Brevik aurait dû mourir sur l'île d'Utoya ("His father has said he wishes Breivik had shot himself on Utoya island").... Inutile de dire que leurs relations n'étaient pas bonnes.

Anders Behring Breivik leaving court in Oslo - Norway massacre: the real Anders Behring Breivik
Brevik avec son Lacoste - Photo Jeff Gilbert (Telegraph)
Brevik s'était déjà fait remarquer comme "taggeur" à Oslo. Il a même été arrêté pour cette raison et cet événement aurait mis un terme à ses relations avec son père.

L'article contient plusieurs autres éléments biographiques qui expliquent les images récentes que nous avons pu voir dans les méidas comme le fameux pull Lacoste que portait Brevik lors de son transport vers la cour il y a quelques jours. L'accusé voulait porté un uniforme de type militaire, ce qui lui a été refusé (il n'est pas militaire). Brevik a donc porté un Lacoste. Une marque de vêtement qu'il affectionne et dont il parle dans son manifeste. Cela fait partie de son jeu. Il soutient, toujours dans son manifeste, que la Phase II de son plan commencera après l'attentat. Au moment où il sera arrêté et affrontera la justice.

Ce sera une période où il tentera de diffuser sa propagande. Son manifeste est la pierre angulaire de cette stratégie mais ses comportements comme accusé sont tout aussi importants. Brevik se donne en spectacle, le jour de la représentation est arrivé ! L'acteur peut enfin interprété devant le public le rôle qu'il répète depuis des mois en solitaire. Le moment tant attendu est donc enfin arrivé.

Il faudrait mettre un terme à cette représentation, mettre du sable dans l'engrenage. Mais comment ?

En privant Brevik de ses moyens. Une première chose a été faites en ce sens. Les autorités norvégiennes l'ont isolé. Il est donc privé des drogues et stéroïdes qu'ils utilisaient depuis un certain temps en préparation des attentats pour être plus "fort".

Mais ce n'est pas suffisant. Il faut qu'il soit poussé aux limites de ses contradictions. C'est pas le raisonnement logique que l'on pourra idéologiquement le détruire complètement. Il n'est pas atteint d'une maladie mentale mais d'une maladie intellectuelle. Ce type de maladie se manifeste communément sous la forme du discours idéologique. Ce type de discours prétends détenir (et détient en partie) deux valeurs très recherchées et très attractives : la vérité et le salut. Deux choses qui relèvent ordinairement de deux sphères d'activités différentes, sinon incompatibles, la science et la religion. La maladie intellectuelle dont nous parlons consiste, en gros, à tirer des conclusions hâtives sur les deux plans (scientifiques et religieux) à partir de pièges linguistiques qui peuvent créer en même temps (1) l'illusion de la vérité et (2) de faux espoirs de salut.

Punir Brevik aura certainement un effet, mais on peut difficilement prévoir lequel. Il peut ressortir d'une telle épreuve plus dur qu'avant, plus dangereux, un peu comme al-Zawahiri. Le faire disparaître ne serait pas non plus une solution complètement satisfaisante, il deviendrait un martyr pour ceux qui pensent comme lui. Il faudrait plutôt arriver à le pousser dans ses derniers retranchements par la force d'une argumentation logique.

Pour cela il faut comprendre les enjeux qui sont à l'origine du mal, au-delà de cet individu particulier. Il faut, autrement dit, s'élever au-dessus de lui et offrir une riposte à un autre niveau, plus fondamentale, et de manière plus satisfaisante du point de vue intellectuel.

Entendons-nous bien. Il y a différents angles de discussions : légaux (Brevik a commis un crime punissable par la loi norvégienne), moraux (Brevik est inexcusable) et politique : Brevik se trompe et son erreur est dû à une maladie intellectuelle dont il n'est pas le seul à souffrir. Cette maladie ne le rend pas criminellement ou moralement irresponsable. Soigner Brevik, c'est soigner du même coup une maladie intellectuelle qui frappe non seulement la Norvège mais toute l'Europe.

NOTE :  Pour plus de détails sur la notion de maladies intellectuelles dans le contexte du discours idéologique voir notre : Géopolitique et Démocraties, Frison-Roche, Paris, 1995, pp. 40-48. (Ce livre est répertorié dans la colonne de droite de ce blog.)

Norway massacre: the real Anders Behring Breivik - Telegraph

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